Néonazis : un cerveau et des suiveurs

Sur cette photo, le leader du groupuscule est identifiable par ses tatouages des mains.
Erstveröffentlicht: 
22.05.2014

Enquête - Après les interpellations de 4 membres du groupe baptisé « Blood & Honour C18 », à Morteau et en Saône-et-Loire

 

Besançon. Les armes ? « On les leur avait prêtées car ils n’avaient pas les moyens de s’en payer. » Voilà résumé en une seule phrase du procureur de la République de Vesoul, Jean-François Parietti, la réalité du groupuscule néonazi « Blood & Honour Combat 18 France ».

Entre posture terroriste et baudruche à moitié gonflée, les auditions des quatre hommes, interpellés à Morteau et en Saône-et-Loire dans la journée de mardi, ont permis de ramener la menace à une plus juste proportion. Celle d’une association de bric et de broc reposant principalement sur les cogitations fumeuses d’un seul individu. L’un des deux frères mortuaciens, idolâtre d’Adolf Hitler, révérant la légende sanglante de Combat 18 au point de se l’être fait tatouer dans le cou. Les autres ne sont que des suiveurs, à commencer par son frère aîné de cinq ans, surtout connu pour des délits d’ivresse au volant.

 

« Ils veulent mener des actions contre tout ce qui pourrait entacher notre beau pays »

C’est le cadet, âgé de 28 ans, qui détient le plus lourd palmarès judiciaire avec sept mentions depuis 2004, principalement pour des faits de violence, à l’encontre de supporters monégasques à l’issue d’un match sur le Rocher en 2006, lors d’une bagarre à la fête de la saucisse de Morteau en 2008, et à la sortie d’une discothèque, en 2010 à Métabief. Dernière condamnation qui lui vaut de passer deux ans derrière les barreaux.

L’enquête a débuté au mois de février dernier, après la découverte de deux inscriptions « C 18 » sous un pont et dans le quartier sensible des Capucins à Gray, en Haute-Saône, affublé de la mention « islam dehors ». Le soin apporté au graphisme, la référence à Combat 18 et l’information complémentaire de la location d’un gîte alentour par un groupuscule néonazi, à la même période, déclenchent une enquête préliminaire. Celle-ci permet d’identifier très rapidement le Mortuacien, leader du groupe qui cherche alors à se faire adouber par la section serbe de Combat 18, qui semble être le maître de cérémonie européen de cette mouvance sulfureuse.

Sur le plan « politique », la nouvelle section franc-comtoise se « prépare au grand soir, en mêlant idéologie néonazie aux tensions sociales du moment. Ce ne sont pas de grands idéologues, ils veulent mener des actions contre tout ce qui pourrait entacher notre beau pays, contre les dealers, par exemple, mais ils se distinguent d’abord comme anti-musulmans. Ils ont l’impression d’être en guerre même si, sur le plan historique, ils se prennent un peu les pieds dans le tapis. »

Les quatre hommes seront déférés ce matin au parquet de Vesoul, qui concentre l’intégralité des enquêtes menées à l’encontre du groupe. Une information judiciaire devrait être ouverte pour association de malfaiteurs en vue de la participation à un groupe de combat, réprimée par une peine maximale de dix ans d’emprisonnement ainsi qu’incitation à la haine raciale.

Les saisies réalisées aux domiciles des quatre ont permis de trouver un buste de Hitler, une banderole de 4 m de long, plusieurs versions françaises de « Mein Kampf », des cagoules identiques à celles portées sur la photo du groupe armé sur laquelle aucun n’a cherché à dissimuler sa présence, ainsi que l’ordinateur servant à alimenter le site de Combat 18 France.

Toutefois, « l’enquête ne fait que commencer », a indiqué le procureur Parietti qui a bon espoir de rassembler l’intégralité des membres de Combat 18 France. « Pour l’instant, on a le cerveau et le trésorier. On aimerait bien mettre également la main sur les armes, déterminer l’architecture totale du groupe, son financement, son but et ses motivations réelles. Je pense qu’ils avaient dépassé le stade de la baston d’après boire et se sentaient désormais capables d’organiser une descente pour corriger quelqu’un ! »

Fred JIMENEZ